Qui est Mohammed Abou Al-Joulani, Ce nouvel homme "FORT" de la Syrie?

Autrefois surnommé "le fantôme du désert", Abou Al-Joulani est désormais l’homme qui incarne, selon certains, l’avenir de la Syrie. Issu des rangs d'Al-Qaïda avant de fonder le groupe Hayat Tahrir al-Sham (HTS), il a su évoluer de chef de guerre insaisissable à un acteur politique incontournable. Et le plus surprenant ? Le monde occidental semble prêt à lui dérouler le tapis rouge.

SYRIE

Amal Ben Aly

12/10/20242 min read

Un parcours atypique, mais visionnaire (ou opportuniste)

Né en 1981, dans une famille syrienne modeste, Abou Mohammed Al-Joulani — de son vrai nom Ahmed Hussein al-Shar’a — s'est illustré dans les cercles jihadistes à la faveur de la guerre civile syrienne. Longtemps considéré comme un ennemi redoutable des puissances occidentales, il a depuis opéré une transformation d’image qui laisse rêveur. Costume-cravate lors de ses rares apparitions publiques, discours empreints de modération (en surface) : le chef de HTS joue désormais la carte de la respectabilité.

"Un partenaire crédible" selon les chancelleries occidentales

À Paris, Washington ou encore Londres, Abou Al-Joulani est passé d’ennemi juré à partenaire potentiel. En privé, des diplomates louent sa capacité à "maintenir l’ordre" dans les territoires contrôlés par HTS, où règne désormais une forme de stabilité relative, bien qu’assortie d’un strict contrôle idéologique.

Le président Emmanuel Macron, lors d’un récent sommet, n’a pas manqué de souligner que "la Syrie a besoin de leaders capables de garantir une transition pacifique". Dans une déclaration presque désinvolte, il a ajouté : "Le passé, c’est le passé. Ce qui compte, c’est l’avenir."

Un changement d’alliances stratégique

Pourtant, il n’y a pas si longtemps, Al-Joulani figurait sur la liste noire des terroristes les plus recherchés par l’Occident. Alors, pourquoi ce soudain revirement ? Les analystes avancent plusieurs raisons :

1. L'absence d’alternative crédible : Avec la chute de Bachar Al-Assad, les options se sont réduites comme peau de chagrin.

2. Un pragmatisme occidental : "Mieux vaut un jihadiste modéré qu’un anarchiste imprévisible", souffle un expert en relations internationales.

3. Le rôle géopolitique : Al-Joulani se pose en rempart contre d’autres factions extrémistes, comme l’État islamique, tout en s’opposant à l’influence iranienne.

Un leader ou un caméléon ?

Abou Al-Joulani excelle dans l’art de se réinventer. Il est passé du radicalisme pur et dur à un discours politique teinté de réconciliation, sans jamais renoncer à ses objectifs idéologiques de fond. Ses détracteurs rappellent que sous son commandement, des violations des droits humains ont été documentées, y compris des exécutions sommaires et la répression des dissidents. Mais cela semble être un détail pour ses nouveaux admirateurs internationaux.

Et les Syriens dans tout ça ?

Sur le terrain, les opinions divergent. Certains voient en Al-Joulani un "moindre mal" capable de ramener une forme d’ordre dans le chaos syrien. D’autres craignent qu’il n’apporte qu’une version remodelée de l’oppression, où la charia demeure la pierre angulaire du régime.

Un habitant d’Idlib confie : "Nous vivons entre le marteau et l’enclume. Si Al-Joulani est notre avenir, alors nous devons préparer nos prières."

Conclusion : La realpolitik triomphe encore

Abou Al-Joulani, ancien homme de l’ombre, est désormais sous les projecteurs. Pour l’Occident, il symbolise une opportunité : celle de stabiliser une région stratégique tout en tournant la page d’Assad. Mais à quel prix ? Si le monde semble prêt à oublier son passé, les Syriens, eux, devront vivre avec les conséquences de ce choix. Quant à Al-Joulani, il prouve une fois de plus que dans la guerre comme en politique, tout est affaire d’adaptation.